Après avoir publié une capsule sur treize erreurs courantes de langue française qu'il a relevé lors des présentations orales d'étudiants ou d'étudiantes et de la lecture de leur rapport de stage, voici que le professeur Bernard-Simon Leclerc, coordonnateur académique du nouveau doctorat professionnel en santé publique, récidive avec une capsule sur les règles d’utilisation des termes « médecin » et « docteur » ainsi que leur abréviation « MD » et « Dr ».
Une erreur courante, même au Québec ?
Les programmes d’étude de l’École de santé publique de l’Université de Montréal accueillent plusieurs étudiants, tant étrangers que d’ici, qui ignorent les règles d’utilisation des termes « médecin » et « docteur » ainsi que leur abréviation « MD » et « Dr ». Il n’est pas étonnant qu’il en soit ainsi puisque même nos résidents du Québec les méconnaissent.
La présente capsule vise donc à attirer votre attention sur des particularités locales quant à l’utilisation appropriée des titres de « Docteur » et de « médecin » ainsi que des abréviations « Dr » et « MD » les représentant. Si l’utilisation du terme docteur est plutôt libérale et répandue dans le monde anglosaxon et les sciences biomédicales, leur utilisation permise au Québec est plus restrictive et contrôlée. Leur emploi comme titres professionnels présente certaines particularités qui dépendent de la profession et du diplôme universitaire de la personne.
Qui peut s’identifier comme « médecin » au Québec ?
Selon l’article 32 du Code des professions (https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/C-26), seules les personnes inscrites au tableau de leur ordre professionnel, en l’occurrence le Collège des médecins du Québec, et titulaires d’un permis de pratique valideont le droit d’utiliser le titre de médecin. Ainsi, une personne ayant poursuivi des études de médecine à l’étranger peut légitimement affirmer avoir fait de telles études dans une université reconnue de son pays et avoir obtenu un diplôme l’attestant, mais elle ne peut pas s’identifier comme médecin lorsqu’elle réside au Québec. Le Bureau du syndic du Collège déclare également que l’utilisation de l’abréviation « MD » à côté de leur nom n’est pas permise en respect des dispositions dudit Code des professions, soit des articles 32 et 58.1.
Ainsi, il faut retenir qu’au Québec l’utilisation du titre de médecin et de son abréviation « MD » est strictement réservée aux titulaires inscrits au tableau de l’ordre et détenant un permis d’exercice valide.
Qui peut s’identifier comme « docteur » ?
Une personne ne peut employer le titre de docteur que selon des règles très précises.
D’abord, un médecin, mais également un dentiste et un vétérinaire membre de son ordre professionnel au Québec, peut utiliser sans restriction le titre de docteur (abrégé en Dr) précédant le nom propre (par exemple, docteur Louis Untel).
Une autre nuance, en passant, comme le précise l’Office québécois de la langue française : on doit faire précéder le mot docteur (ou son abréviation) d’un déterminant défini lorsqu’il est employé devant un nom de famille.
- J’ai consulté le docteur Garand (et non : J’ai consulté docteur Garand).
- Le Dr Boileau prononcera quelques mots lors de la conférence de presse (et non : Dr Boileau prononcera).
Pour poursuivre sur l’utilisation du terme docteur, mentionnons que toute personne qui a obtenu un diplôme de doctorat reconnu peut également être identifiée comme docteur, mais sous certaines conditions.
L’utilisation du terme docteur placé avant le nom et suivi du titre réservé est autorisée aux membres d’un ordre professionnel détenant un permis si pour devenir membre dudit ordre professionnel et exercer sa profession, le professionnel doit obtenir un diplôme de doctorat d’une université reconnue. Par exemple, nous pourrions parler du docteur Bellevue, optométriste, ou de la docteure Jacinthe Royer, pharmacienne, ou du docteur Pierre-Yves Roy, chiropraticien. Dans ces exemples, le titre de docteur peut légitimement précéder le patronyme parce qu’un optométriste, un pharmacien ou un chiropraticien doit détenir un doctorat pour pouvoir pratiquer sa profession. La personne doit cependant faire suivre la formulation du nom de sa spécialité, en l’occurrence ici optométrie, pharmacie ou chiropratique.
Enfin, le titre de docteur peut être utilisé après le nom pour toute personne qui détient un diplôme de doctorat en autant que l’on spécifie le domaine d’obtention du diplôme. Par exemple, nous pourrions parler de monsieur Bernard Choi, docteur en épidémiologie. Dans cet exemple, la formulation employée est « docteur en...» (en étant suivi du nom de la spécialité) placée après le patronyme. Dans pareils cas, le titre de docteur ne doit jamais précéder le patronyme (ou nom propre) mais le suivre.
Un peu compliqué tout ça, me direz-vous ?
Merci au professeur Bernard-Simon Leclerc pour cette capsule!